À l'âge de vingt ans, je découvre, lors d’un voyage en Andalousie, que juifs, chrétiens et musulmans surent cohabiter et s’enrichirent mutuellement, grâce à l’acceptation de leurs différences.
Étrangement, je ressentis, au plus profond de mon être, un écho à ma propre histoire. Toutes les questions d’identité que je me posais trouvèrent de lors une résonance au regard de cette Espagne médiévale dite « des trois cultures, des trois religions ».
À mon retour en France, je dévore des ouvrages traitant du sujet et découvre le lien musical de ces trois cultures. Autodidacte, je retranscris, « à l’oreille » les paroles de ces chants qui parlent d’amour et de quête de soi. Tous, quelle que soit leur langue, traitent des mêmes thèmes universels propres à tous les peuples : l’amour divin et l’amour humain. Tous ces sentiments qui tendent à transcender, unifier l’être dans son essence la plus profonde, dans un paradigme universel qui place l’homme au centre du tout.
Me voici alors chanteuse troubadour dans les rues et dans les églises et tandis que je retrouve vie, je chante dans des langues dites mortes, comme l’espagnol ancien et le galicien. Je chante des chants séfarades propres à la tradition juive, des chants de louanges et des prières musulmanes.
J’aime faire résonner ma voix dans ces églises romanes. Leurs murs et leurs pierres recèlent des secrets dont on dirait que mon âme se souvient et dont elle se nourrit : confidences sur la tolérance, le partage et le respect qui ont uni des hommes dans leurs diversités humaines et cultuelles…
J’aime faire résonner ma voix dans ces églises romanes. Leurs murs et leurs pierres recèlent des secrets dont on dirait que mon âme se souvient et dont elle se nourrit : confidences sur la tolérance, le partage et le respect qui ont uni des hommes dans leurs diversités humaines et cultuelles…
Je chante et me guéris, retrouvant ainsi, dans ces premiers pas, les prémices de mon identité. Non pas mon identité kabyle ou française, chrétienne ou musulmane, mais toutes celles-là réunies en une seule plus une; l’identité de mon âme!
À cette époque, je n’avais pas conscience que cette quête profonde d'identité me demanderait un jour d'ouvrir mon regard et mon cœur, d'honorer l'appel de mon âme, pour laisser derrière moi ce sur quoi je m'étais construite, à savoir le répertoire des trois cultures, des trois religions.
Pourtant déjà à l'époque lorsque pour des entretiens journalistiques on me demandait: « Mais pourquoi ne chantez-vous pas dans la langue de vos parents? », je répondais invariablement « que la langue de ma famille est celle de l’amour, elle n’est pas faite d’une seule résonance, mais de plusieurs »…